La violence est-elle une maladie comme les autres ? - Nouvelle Page Santé

La violence est-elle une maladie comme les autres ?

Nous vivons une période bien trouble.

Moi qui fais partie des indécrottables optimistes, je me sens pourtant parfois perdu et découragé par tant de violence morale et physique depuis quelques mois voire années.

Je ne suis certainement pas le seul dans ce cas.

Face à ces actes de violence qui se multiplient, une question se pose : cette violence est-elle inscrite dans l’ADN de l’Homme ou se propage-t-elle comme un virus affectant au passage les individus incapables de lui résister ?

Et surtout, comment s’en sortir ?

Des chercheurs américains ont peut-être trouvé la réponse à cette question.

La violence est une “maladie infectieuse”

Je suis tombé il y a peu sur une étude menée par des chercheurs de la Harvard Medical School, à Boston où le Pr Felton Earls et son équipe ont mené plusieurs recherches autour de la violence1.

Ils ont entre autres suivi plus de 1500 adolescents de 78 quartiers de Chicago, aux États-Unis, pendant 5 ans2.

Leur but ? Comprendre comment la violence naît et comment elle se propage autour de nous.

Après avoir étudié la personnalité de chaque adolescent, décrypté son milieu familial, ses performances scolaires et pris en compte le quartier dans lequel il évolue, ils sont arrivés à cette conclusion glaçante : la violence ressemble à une maladie infectieuse et elle se transmet par contact.

Les jeunes qui assistent à des actes de violence courent un risque accru de dépression, de détresse, d’agressivité et de troubles du comportement.

Assister à des violences commises avec armes à feu multiplierait par deux le risque de devenir un adulte brutal.

Nous pourrions penser qu’au contraire, être soi-même victime ou témoin d’actes violents devrait inciter à rejeter ce genre de comportements, eh bien non.

« C’est comme une maladie infectieuse, mais au niveau social » assure Felton Earls.

Il précise même qu’il s’agit d’un facteur plus important que la pauvreté ou la drogue.

La violence appelle la violence.

Faites comme votre voisin !

Nous connaissons tous l’effet de groupe. Il est particulièrement à l’œuvre dans le harcèlement scolaire.

Il suffit que deux ou trois crétins choisissent une tête de turc pour se défouler et c’est toute la classe ou presque (parfois même tout l’établissement scolaire) qui leur emboîte le pas.

Les conséquences sont dramatiques et les coupables semblent bien souvent ne pas mesurer la gravité de leurs actes.

Nous assistons à une sorte de transe collective où l’inacceptable devient une sorte de norme.

Pour comprendre ce phénomène il faut savoir que l’imitation est une tendance innée chez les primates et les humains.

Ce mimétisme inconscient a été expliqué par la découverte des neurones miroirs.

Ces cellules cérébrales se mettent en action lorsque nous voyons quelqu’un faire quelque chose et ont pour fonction initiale l’apprentissage.

Dès la naissance, ce groupe de neurones nous permet d’apprendre à manger, à nous habiller, à parler…

Nous en voyons un effet immédiat et concret lorsqu’une personne se met à bailler et que ses voisins se mettent à faire de même presque simultanément.

Leur action devient malheureusement bien moins amusante ou positive lorsqu’on se met à imiter les comportements violents qui fleurissent autour de nous.

A l’ère des jeux vidéos et des séries ultra violentes auxquels les jeunes sont exposés plus que de raison, il y a de quoi s’inquiéter.

Une multitude d’études l’affirment3 4 : assister à des actes de violence, y compris fictifs (télévision, jeux, internet…) favorisent la reproduction et la banalisation de ces actes dans la vie réelle.

Il a été démontré par exemple que des enfants de 5 à 11 ans exposés à un feuilleton violent pendant 20 minutes avaient 7 fois plus de chances de se montrer agressifs dans les minutes qui suivaient par rapport à leurs camarades non exposés.

De même, visionner régulièrement des films violents à l’adolescence influence les conduites agressives de l’adulte, indépendamment du QI, de la classe sociale, des pratiques éducatives parentales ou des tendances agressives des participants au début de l’étude.

Cet effet miroir n’est bien entendu pas le seul facteur déclenchant de la violence.

La notion de survie, la volonté de défendre une cause qui nous paraît noble, l’incompréhension de l’autre, l’impression de devoir faire face à une menace, la peur, sont autant de facteurs à prendre en considération.

La violence et l’agressivité sont bel et bien, avant tout, un aveu de faiblesse.

Il existe un gène responsable de la violence

La communauté scientifique a longtemps hésité à se pencher sur une question délicate : existe-t-il un ou plusieurs gènes responsables d’un comportement agressif ?

Mais c’est chose faite aujourd’hui, et les découvertes commencent à tomber.

Un gène en particulier (même si plusieurs ont été identifiés) appelé Mao-A (pour monoamine oxydase A) semble effectivement jouer un rôle.

Des mutations anormales dans ce gène qui le rendent inactif sont liées à un comportement agressif.

Cela a été démontré chez l’animal et chez l’homme5 6.

Bien évidemment, la présence de ce gène défectueux n’engendre pas systématiquement des êtres violents. L’environnement et leurs parcours de vie personnels influent sur leur comportement.

Jusqu’à un individu sur 5 (soit 20 % de la population) serait porteur de ces gènes mutés, sans forcément passer à l’acte. De même, certaines personnes violentes n’ont aucune de ces mutations.

Un individu porteur de ces mutations aurait en réalité 5 à 10 % de risque d’être violent uniquement en raison de ses prédispositions génétiques.

Guérir la violence

L’épidémiologiste Gary Slutkin fait partie de ses personnalités qui, comme le Pr Felton Earls, a choisi de traiter la violence comme une maladie.

En fondant l’ONG Cure Violence7 (guérir la violence en français), dont le mot d’ordre est qu’il faut « traiter la violence comme une épidémie », il ambitionne de la traiter en s’attaquant à la source.

Au terme de sa première année d’activité son association a permis de réduire les tirs par arme à feu de 67 % dans le quartier de West Garfield à Chicago.

Par quels miracle a-t-il pu obtenir de tels résultats ?

« Pour arrêter la transmission de la violence, vous devez d’abord identifier les premiers cas. Pour la tuberculose, vous devez trouver quelqu’un qui infecte d’autres personnes. C’est pareil pour la violence. » explique le Dr Slutkin.

Il utilise pour cela des personnes connues localement, formées aux techniques de persuasion, qui interviennent pour identifier la source du conflit et apaiser les premières tensions.

« La deuxième chose à faire consiste à prévenir la propagation, ce qui signifie trouver qui d’autre a été exposé, mais qui ne contaminera personne pour le moment. Comme quelqu’un qui aurait la tuberculose sans symptôme apparent, ce serait quelqu’un qui se contenterait de traîner dans le quartier, mais dans le même groupe de violence. Ces personnes-là aussi doivent être gérées et dirigées dans un sens particulier répondant au processus spécifique de la maladie. »

« Enfin, il faut s’occuper du contexte, comme l’éducation, pour renforcer l’immunité de groupe. ».

Depuis la création de Cure violence en 1995, ce sont plusieurs dizaines de quartiers qui ont bénéficié de cette approche, permettant de réduire la violence de 37 à 70 %.

Le modèle fonctionne si bien qu’il devenu mondial, s’étendant à l’Amérique du sud, à l’Afrique, à la Syrie ou à l’Irak8.

La conclusion revient à Gary Slutkin : « la violence ne se produit pas forcément parce que les gens sont mauvais. Les gens acquièrent les comportements d’autres personnes par effet mimétique. »

Les fameux neurones miroirs.

Bien sûr, un monde sans violence n’est pas pour demain, c’est une évidence. Elle a accompagné l’humanité depuis la nuit des temps et l’accompagnera sans doute jusqu’à la fin.

Cependant, si les neurones miroirs nous font singer les personnes peu recommandables, il faut aussi prendre en considération que l’effet inverse est tout aussi vrai.

Alors, semons et cultivons plutôt le respect, la gentillesse, la bienveillance, et l’altruisme. Notre monde ne s’en portera que mieux.

Et vous, comment vivez-vous ces vagues de violences ? Comment vous en protégez-vous ? Donnez-moi vos recommandations en commentaire de cette lettre.

A bientôt,

Laurent des éditions Nouvelle Page

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Sources :

Merci de ne poser aucune question d’ordre médical, auxquelles nous ne serions pas habilités à répondre.

En soumettant mon commentaire, je reconnais avoir connaissance du fait que les éditions Nouvelle Page pourront l’utiliser à des fins commerciales et l’accepte expressément.

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Julie Bazinet
Julie Bazinet
1 année il y a

Merci beaucoup pour cette page. Ce que j’ai vécu à Québec dans les quartiers centraux du centre ville ces deux dernières années m’a laissé avec ce grand sentiment d’impuissance colère et tristesse face à ce que nous sommes devenus comme société. De vous lire sur ce sujet m’apporte réconfort et je vois bien que je ne suis pas seule à éprouver ce sentiment d’urgence face à la violence sociale.

Merci beaucoup aussi pour les vidéos de Dr Tran c’est très apprécié.

«Normande Vasil
«Normande Vasil
1 année il y a

Monsieur, J’ignore si vous connaissez mes écrits sur la violence et sur la non-violence mais depuis 40 ans je travaille sur cette problématique et j’ai publié 3 essais qui analysent ces problèmes de violence sous toutes leurs formes tout en apportant des solutions non-violentes, face à cette situation . Vous pouvez avoir des détails sur mon œuvre à l’Union des écrivains québécois ou à mon adressa Internet. Je suis heureuse que vous vous intéressiez à cette question car j’ai comme une mission dans cette vie qui est de contribuer à diminuer la violence entre êtres vivants. .Merci et bonne chance… Lire la suite »

Souto
Souto
1 année il y a

Mon père était violent parcequ’il buvait et j’en ai beaucoup souffert

Claire
Claire
1 année il y a

Personnellement, pour me rendre plus douce et plus patiente envers ma mère qui a 90 ans
avec qui je vis, donc pour essayer de transformer une violence qui peut parfois monter en
moi, je lis presque tous les matins les évangiles et je prie pour les autres ,ma famille mais
aussi toutes les personnes qui sont dans l’épreuve dans le monde, selon ce que j’entends
aux informations, et aussi j’essaye de me rappeler la vertu de l’humilité, dont peut découler
beaucoup d’autres vertus. Il faut commencer à se transformer soi-même avant de vouloir
transformer le monde.

DIABATE
DIABATE
1 année il y a

Mon fils est décédé suite à un coup de couteau. Je travaille ce sujet depuis la création de notre Association.
J ai apprécié cette article et beaucoup appris.

Capetdepe
Capetdepe
1 année il y a

Personnellement en face d’attitudes agressives je suis dans le dialogue. Très souvent l’incompréhension des intentions de l’autre provoque de l’agressivité qui retombe dès que l’on s’est expliqué calmement. (pour les petits heurts de tous les jours.) Mais l’hyper violence nous la subissons je ne suis pas sûre qu’on puisse vraiment s’en protéger… Et la crainte de cette hyper violence peut devenir paralysante.
C’est pour celà qu’aborder constamment dans les médias tous ces faits divers et y y revenir en boucle est de mon point de vue préjudiciable pour le moral de la population.

Leman Patrice
Leman Patrice
1 année il y a

Bjr et merci pour ce mail. je ne suis pas qlq’un d’agressif de nature mais il est vrai qu’il suffit de monter sur l’autoroute pour changer de comportement face à l’agressivité de bcp de conducteurs. débordement par la gauche , par la droite .. moi d’abord. etc.. et dans la vie de tous les jours nous nous heurtons à des gens qui savent tout mieux que vous et qui cherchent à imposer à tout pris leur façon de faire et de voir les choses. De plus nous nous heurtons de + en + souvent à la mauvaise volonté voir à… Lire la suite »

christina holmgren
christina holmgren
1 année il y a

Bravo pour ce message très intéressant et pour avoir choisi ce thème d’actualité, de surcroît, sans esprit de jugement. Il serait intéressant de savoir en quoi consiste cette
méthode?
Et comment nous pouvons chacun à notre niveau individuel contribuer à plus de douceur dans le monde. C’est une réflexion que j’ai commencé en particulier face au conflit Russo-Ukrainien. Comment est-ce que je réagirais en temps de guerre? Impossible de juger, mais plutôt de la reconnaissance de vivre en temps de paix et de manière privilégiée, cela me donne des
obligations. Encore merci.

Anne
Anne
1 année il y a

Merci pour cet article très intéressant. Si la violence pourrait être une maladie vous dites aussi que même qq1 qui ne porte pas de signes peut devenir violent au contact de personnes ou d expériences de violence .Je le pense aussi .Alors je me pose cette question pourquoi difuse t on tant de films violents à la TV aux heures de grande écoute familiale en osant ajouter Bonne soirée !!!! En plongeant les gens dans un climat de stress et d angoisse ! ? En effet de la fiction à la réalité beaucoup franchissent le pas . Je pense que… Lire la suite »

Marie-Paule DUCOURTIL
Marie-Paule DUCOURTIL
1 année il y a

Il existe la technique du bouclier énergétique qui ne laisse passer que le positif et renvoie le négatif…A n’utiliser qu’en étant certain de n’émettre que du positif , sinon l’effet boomerang se fera sentir !

Annabelle
Annabelle
1 année il y a

Bonjour votre article ets très intéressant. Mon fils se marié il ya deux ans et il est très violent uniquement verbale avec sa femme j’ai toute essayé mais sans résultat .
Il lui parle très mal.elle est gentille intelligente douce sa me brise le cœur en voyant sa quelle conseillé vous pouvez me donner afin évité un divorce certain.
Je vous remercie d’avance pour votre réponse.
Bonne journée.

Cristina Bisoc
Cristina Bisoc
1 année il y a

Quand c’est dans mon pouvoir ( que je suis bien ancré et en paix ) j’utilise la compassion , l’empathie, la non action , la non réponse au pis.
Le meilleur moyen de répondre « aux imbeciles» dit on c’est encore de ne pas leur répondre.

PRAT Maryvonne
1 année il y a

Bonjour, Dans ma famille (nous étions 6 enfants), nous avons malheureusement assisté et subi des violences de la part de notre père, décédé maintenant. Quand il commençait à s’énerver, il devenait incontrôlable. On sentait que lui-même ressentait le besoin « d’exploser ». Nos grands-parents nous ont parlé de ses colères dès son plus jeune âge. plusieurs d’entre nous ont hérité de cette violence mais nous sommes parvenus à la dompter pour la plupart. Un de nos neveux est violent et il en ai malheureux. Je ressens qu’effectivement, nous transportons un gêne de violence et j’espère que la science trouvera une solution à… Lire la suite »

Muriel Freitas
Muriel Freitas
1 année il y a

Merci beaucoup pour cet article. Il est grand temps de travailler cette montée de violence.
Certes la violence a toujours existé malheureusement elle s’est décuplée de façon exponentielle depuis « l’invasion  » des jeux vidéos, des films tellement violents que l’on peut se demander comment des êtres humains peuvent créer autant de monstruosité sans penser aux conséquences.

Presti
Presti
1 année il y a

Je rejette la violence, j’ évite les films violents et les personnes orgueilleuses. Regarder un films violent me transmet colère. Donc je préfère lire au calme.

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