Chers amis,
Elodie est une pimpante jeune femme dans la trentaine.
Très branchée santé naturelle, bio et alimentation saine, elle décide en juillet 2012 de se mettre à une alimentation “tout cru”, végan et pauvre en graisse en prime.
Elle espère ainsi avoir une “santé toujours plus radieuse et durable sur le long terme”, augmenter ses chances d’avoir un enfant et rebooster un pancréas “un peu fatigué”.
8 mois plus tard…
- Elle a perdu plus de 8 kg (elle pèse dorénavant moins de 50 kilos pour 1,71 m) ;
- Elle perd ses cheveux ;
- Elle n’a plus ses règles ;
- Elle a des pertes de mémoires ;
- Elle a des baisses de tension ;
- Son ventre est ballonné ;
- Elle a des cernes incrustées sous les yeux, sa peau est fatiguée, son teint est livide ;
- Elle a développé du psoriasis ;
- Ainsi qu’un début d’ostéoporose dans la mâchoire.
Et j’en passe.
Selon ses propres mots, son corps s’est “totalement vidé”.
Le plus parlant est d’aller regarder ses photos sur son blog ici.
Elodie a réagi à temps : elle a stoppé ce régime extrême et son corps s’est bien remis.
Depuis, elle dénonce les excès de ces modes alimentaires qui peuvent être dévastatrices pour certains organismes.
Le cru doit avoir un but thérapeutique
Sur le papier, le cru est séduisant.
Il ne date pas de la mode de la raw food diet venue tout droit des Etats-Unis à grand renfort de promotion et marketing.
Déjà, au milieu du 19e siècle des personnalités comme Sylvester Graham aux États-Unis ou Maximilien Bircher-Benner en Suisse prônaient déjà les régimes à base d’aliments crus.
Il avait au départ un but purement thérapeutique : il s’agissait de soigner une pathologie en redonnant au malade de la vitalité. Une sorte de cure régénérante en quelque sorte.
L’idée est bonne : apporter des aliments « vivants » c’est-à-dire pleins de vitamines et minéraux, non dénaturés par la cuisson, est une bénédiction pour l’organisme.
C’est ce que propose la naturopathe Irène Grosjean, en France, qui fait office de référence sur le sujet.
Devenir crudivore, c’est donc manger essentiellement des végétaux (fruits et légumes), des noix et des graines, des œufs (crus), des produits laitiers (non pasteurisés) et parfois, mais c’est plus rare, des poissons et des viandes (crues évidemment).
Pourtant, je vous déconseille de céder à cette mode et de manger exclusivement cru comme le font certains.
C’est la cuisson qui nous a rendus intelligents
L’humanité doit-elle son évolution exponentielle à la cuisson des aliments ?
Les anthropologues commencent à le croire.
Si l’on ne sait pas encore précisément quand l’Homme a commencé à cuire sa nourriture, les indices convergent pour dire que nous avons changé d’ère grâce à cette pratique.
Le primatologue britannique Richard Wrangham dans son ouvrage, Catching Fire : How Cooking Made Us Human (Basic Books, 2009), l’affirme sans ambages.
Selon lui, sans la cuisson, qui rend les aliments plus masticables et plus digestes, la réduction de la denture, et donc l’accroissement de la boîte crânienne de nos ancêtres (les deux sont liés), n’auraient pu survenir.
Des chercheurs de la Harvard Graduate School of Arts and Sciences dans une étude publiée dans les Actes de l’Académie nationale des sciences (PNAS) tendent à lui donner raison1.
Deux groupes de souris ont été nourris avec un régime cru ou cuit.
Pour chaque régime, les changements de masse corporelle des souris ainsi que leur activité physique ont été observés.
Les résultats montrent que la viande cuite fournit plus d’énergie que la crue, un résultat qui suggère que la cuisson a joué un rôle clé dans l’évolution de l’Homme.
Le fait de passer à un régime alimentaire cuit aurait permis d’augmenter notre corpulence et à notre cerveau de se développer.
J’ai tendance à croire que si nos lointains ancêtres en sont venus à cuire leurs aliments c’est qu’ils en tiraient un bénéfice, qu’il soit gustatif, nutritionnel ou de nature à améliorer leur santé.
Dans la Nature, rien n’est dû au hasard.
Cinq raisons de manger (raisonnablement) cru
Que les choses soient claires, je ne dis pas que manger cru est mauvais. C’est une bonne chose d’apporter des aliments crus à nos repas.
Et je vais même vous surprendre : en général, on ne mange pas assez de cru.
Manger cru a cinq immenses atouts (à condition, encore une fois, de rester raisonnable).
D’abord, la cuisson détruit les vitamines des fruits et légumes.
Entre 60°C et 110°C, quasiment toutes les vitamines (A, B, C, D, E) disparaissent de l’aliment. A partir de 100°C, ce sont les sels minéraux qui commencent à pâtir de la chaleur.
Une ratatouille qui aura mijoté durant des heures sera certainement délicieuse mais malheureusement beaucoup moins intéressante d’un point de vue nutritionnel que des légumes légèrement cuits.
La deuxième raison qui peut plaider en faveur des aliments crus est qu’ils offrent de meilleurs apports en prébiotiques et probiotiques (la chaleur ayant tendance à les détruire2) ce qui permet de renforcer efficacement la flore intestinale.
De même, les aliments crus contiennent des enzymes qui facilitent la digestion or, à partir de 50°C ces dernières sont détruites.
Sous l’effet de la chaleur, les graisses voient leur structure moléculaire modifiée ce qui les rend moins digestes et même parfois dangereuses.
C’est par exemple le cas pour les omégas-3 qui supportent très mal le chaud et se transforment en composés toxiques potentiellement cancérigènes3.
Le beurre et la margarine ne sont pas plus adaptés à la cuisson.
Consommer une huile ou un aliment gras sans le chauffer est la garantie de profiter pleinement de ses bienfaits (en oméga-3 par exemple).
Enfin, pour celles et ceux qui veulent perdre du poids, manger quelques aliments crus en début de repas aide à caler l’estomac. Vous parviendrez plus vite à une sensation de satiété et cela vous aidera à réduire vos portions.
Il faut aussi retenir que la cuisson augmente l’index glycémique4 (IG) de nombreux aliments5.
Celui de la carotte passe d’un IG de 16 à 47 lorsqu’elle est cuite. Celui des pâtes peut presque doubler, selon qu’elles sont al dente ou très cuites !
Par conséquent manger cru est un bon moyen de lutter contre le diabète.
Devenir crudivore est à vos risques et périls
Je vous parlais, au début de ce message, de l’histoire d’Elodie.
Pendant deux mois elle ne s’est alimentée que de végétaux crus et a considérablement réduit ses apports en graisses.
Puis durant les six mois suivants, elle est passée à une alimentation à 80% crue, 100% vegan et pauvre en gras.
Son régime alimentaire se limitait à des jus, des fruits et légumes crus bio à volonté, des pommes de terre vapeurs, du quinoa, de l’avocat et une poignée d’oléagineux tous les deux jours.
Résultat : elle est devenue droguée au sucre des fruits.
Totalement en perte de repères, elle pouvait manger 12 bananes dans la journée !
Imaginez le taux de sucre en circulation dans son organisme.
Le message qu’elle voudrait faire passer tient en quelques mots : « je ne le répéterais JAMAIS assez, on ne sort pas indemne de ce genre de dérive nutritionnelle, et parfois même 6 mois ne suffisent pas pour retrouver une santé totale. »
Des dangers plus fréquents qu’on ne le pense
Au-delà de cette expérience poignante, manger essentiellement cru multiplie certains risques qu’il ne faut pas négliger.
- Un régime cru exclusif conduit souvent à un déséquilibre nutritionnel.
On peut rapidement multiplier ses apports en sucre comme cela a été le cas d’Elodie.
On s’expose alors au diabète, aux maladies cardiaques, hépatiques et rénales, et la liste est non exhaustive…
- Les allergies sont favorisées par les aliments crus car elles proviennent souvent de protéines détruites ou dénaturées par la chaleur.
« Pour les personnes qui ont un terrain allergique, le risque est plus élevé que dans la population générale qui mange des aliments cuits », assure la nutritionniste Florence Foucaut6.
- Plus vous mangez cru et plus vous multipliez vos chances de tomber sur une (très) mauvaise bactérie.
La cuisson constitue la meilleure protection contre les virus, bactéries et parasites que peuvent contenir les aliments.
En 2011, la bactérie E. coli retrouvée dans des graines germées faisait plus d’une trentaine de morts à travers l’Europe7.
Le risque de toxoplasmose congénitale est bien connu des femmes enceintes puisqu’on leur déconseille systématiquement de consommer de la viande crue.
Les aliments crus sont également déconseillés aux personnes immunodéprimées.
- Les fibres des aliments crus peuvent agresser les intestins, entraînant des douleurs et parfois de la diarrhée.
La cuisson modifie la structure des fibres qui deviennent moins irritantes pour le tube digestif.
Comme souvent, tout est question de mesure.
Le Dr. Bircher-Benner que j’ai évoqué au début de cette lettre considérait que consommer 50 % d’aliments crus était un régime tout à fait acceptable.
A bon entendeur.
Et vous, avez-vous succombé à la mode du tout cru ?
A bientôt,
Laurent des éditions Nouvelle Page
Bravo et un chaud merci pour cette excellente présentation qui montre bien toutes les subtilités du sujet!
Bonjour Oui, manger 100% cru peut être dangereux pour la santé mais ce n’est pas le cru en lui même qui est dangereux mais la manière de manger cru, cela ne s’improvise pas. J’ai une alimentation 100% crue depuis 35 ans. Au début, j’ai maigri : perte de 5 kgs en un mois mais j’ai tout récupéré 3 mois après. Je n’ai jamais eu de symptômes inquiétants tels que perte de cheveux, problèmes de gencives, arrêt de règles, etc… Au contraire, ma santé n’a cessé de s’améliorer (je souffrais d’allergies et de problèmes intestinaux). En fait, j’ai eu la chance… Lire la suite »