C’est une révolution qui est passée inaperçue.
Et comme souvent, une bonne nouvelle dont presque personne n’a parlé.
Le jeudi 20 février, la France a officiellement mis fin aux forages pétroliers en mer.
Elle a refusé de prolonger le permis de recherche de la société South Atlantic Petroleum, autour de l’îlot de Juan de Nova. Il s’agit d’un minuscule bout de terre à mi-chemin entre Madagascar et la côte du Mozambique[1], et qui fait partie du territoire français bien qu’il soit situé à près de mille kilomètres de Mayotte.
Est-ce parce que la phase exploratoire n’avait pas permis de trouver de pétrole ? Pas du tout. Le canal du Mozambique, qui sépare Madagascar de l’Afrique, est une des zones les plus prometteuses pour découvrir de nouveaux gisements d’hydrocarbures.
Mais la France a décidé de ne plus se lancer dans l’exploitation de ressources fossiles, afin de tenir ses engagements en matière de réchauffement climatique. Cette décision confirme, un an après l’arrêt des forages prospectifs au large de la Guyane, la décision de la France de ne plus développer d’exploitations pétrolières.
En Guyane aussi, les premiers sondages étaient encourageants. Mais la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels (c’est-à-dire le pétrole) et non conventionnels (pour faire simple, le gaz de schiste et les sables bitumineux) est formelle : pas de nouveaux forages[2]. Elle est donc appliquée.
Les Français, ces réfractaires : en effet…
Vous pensez peut-être que tout le monde fait pareil ? À savoir, renonce volontairement à développer de nouveaux gisements d’énergie fossile, dont on sait qu’il vont aggraver le réchauffement climatique ?
Mais pas du tout, j’aurais même envie de dire, bien au contraire.
Quelques exemples récents.
À la fin de l’année dernière, Pemex, la compagnie pétrolière nationale du Mexique, a révélé l’existence d’un « gisement gigantesque » contenant, selon ses calculs, près d’un demi-milliard de barils équivalent pétrole (BEP), soit la plus grande découverte depuis près de quarante ans. Pemex espère produire dès 2020 69 000 barils par jour de pétrole et de 300 millions de pieds cubiques de gaz naturel, à partir de 11 puits, pour commencer[3].
Aucun cas de conscience !
Le dimanche 5 octobre 2019, la Norvège a débuté l’exploitation d’un énorme champ de pétrole situé entre ce pays et l’Écosse[4]. L’exploitation est censée durer 50 ans, soit bien après la date butoir de 2050 stipulée dans les Accords de Paris pour un arrêt des émissions nettes de gaz à effet de serre.
Comment les Norvégiens, qui sont par ailleurs à la pointe en matière de protection de l’environnement, défendent-ils cette entorse à leurs principes ? Ils expliquent que la production de ce pétrole polluera dix fois moins que les anciennes plateformes, car la plateforme sera reliée au réseau électrique, et recevra de l’électricité de production hydraulique.
Cependant, le pétrole extrait polluera évidemment autant qu’un autre lorsqu’il brûlera[5] ! Produire du pétrole écologique, c’est une idée qui aurait ravi Pierre Desproges et Raymond Devos réunis.
“Aucun pays ne choisirait de laisser 173 milliards de barils de pétrole dans le sol”[6]
Eh si, la France !
Cette citation de Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, prononcée en 2017 devant un parterre d’industriels du pétrole évidemment ravis, résonne étrangement aujourd’hui.
Il parlait de Teck Frontier Mine, une gigantesque mine de sables bitumineux à ciel ouvert (près de 300 kilomètres carrés). Ce projet est si controversé qu’une quarantaine de prix Nobel ont écrit une lettre ouverte à Justin Trudeau lui demandant d’y renoncer[7].
Aux dernières nouvelles (du 24 février 2020), ce projet pourrait capoter, non pas à cause d’un refus du gouvernement canadien, mais parce que l’exploitant pressenti a renoncé à candidater, expliquant qu’on lui rendait les choses trop difficiles (il demandait la garantie qu’un pipeline serait construit pour acheminer le pétrole produit sur place)[8].
Nous aussi, on aurait bien besoin de cet argent, non ?
Et je ne vous parle pas des États-Unis, qui ont pour ainsi dire doublé leur production d’énergie fossile depuis 2010 (et oui, aussi sous Obama)[9].
Alors sommes-nous plus malins que tout le monde ? N’aurions-nous pas nous aussi besoin de ces ressources naturelles pour éponger notre dette, augmenter les salaires des enseignants et des personnels soignants et payer nos futures retraites ?
À court terme oui, cela ferait le plus grand bien à nos finances.
Mais le réchauffement climatique nous oblige à réfléchir à long terme – même si nous avons tous beaucoup de mal. Et puis après tout, ce pétrole que nous n’extrayons pas aujourd’hui, il va rester dans le sol encore quelques millions d’années. Il deviendra peut-être encore plus précieux le jour où il y aura beaucoup moins de pétrole disponible et où nous aurons découvert une manière propre de l’utiliser.
Il est vrai qu’il existe une autre possibilité qui voudrait qu’une fois l’ère des énergies fossiles révolue, ce pétrole n’ait plus de valeur économique et que nous réalisions collectivement que, oui, la France a volontairement sacrifié une grande richesse naturelle.
Au nom de quoi ? Au nom de la protection de la planète et en vertu d’engagements pris par 195 des 197 pays reconnus par L’Organisation des Nations Unies[10].
Devrions-nous en avoir honte ? C’est quand la dernière fois que nous avons été fidèles à de grands principes ?
Avoir une vision long terme, peut-on être contre ? Le tout, tout de suite, c’est bien ce qui nous tue, non ?
Les baleines n’aiment pas le pétrole
Allez, j’ai envie de partager une autre bonne nouvelle qui vous a sans doute également échappé.
Les baleines bleues, le plus gros animal vivant sur notre planète (jusqu’à trente mètres de longs et 170 tonnes), sont probablement sauvées[11].
Lorsque la chasse à la baleine a enfin été interdite, dans les années 60, la population avait été décimée au point que beaucoup pensaient que son extinction était inévitable, d’autant que plusieurs pays ont continué la chasse illégalement jusque dans les années 70.
Cinquante ans plus tard, les observations sont très encourageantes. Les baleines bleues sont de nouveau observables dans une de leurs zones de prédilection, dont elles avaient totalement disparu. Entre l’Argentine et l’Antarctique, une première baleine a été observée en 2018. La mission d’observation effectuée en 2020 a permis de dénombrer 55 spécimens en 21 jours.
Ceci confirme les observations faites pour d’autres cétacés, notamment les baleines à bosse qui ont retrouvé le chemin de New York depuis quelques années[12].
Comme quoi, tous ensemble, avec de la volonté, on peut faire des choses magnifiques.
Et qui aurait aujourd’hui l’idée saugrenue de prétendre que la chasse aux baleines est nécessaire pour la croissance, pour sauver des emplois ?
P.S. : Le geste simple que vous pourriez faire aujourd’hui ?
Écoutez le chant des baleines.
https://www.youtube.com/watch?v=TrCj3QoolyM
Voici le bilan Macron :
https://decrochons-macron.fr/le-vrai-bilan/?utm_source=sendinblue&utm_campaign=Action__Collecte__Liste_dattente&utm_medium=email
Sans mauvaise intention.
Monsieur Forge, comme tous les écolos est un doux rêveur. Dire que c’est par crainte de pollution ou noblesse d’âme que l’on n’a pas exploité cette ressource, c’est de l’utopie. Tout ce que font les politiques est beaucoup plus terre à terre; ils ont des visées personnelles, en vue de leur propre popularité ou de leur réélection, ou encore pour caresser les « verts ». D’autre part, l’exploitation d’un gisement aussi éloigné n’a sans doute pas été trouvé très pertinent financièrement à un moment où l’on a tant de priorités. Cependant, je vous admire quand vous dites que ce pétrole aura une… Lire la suite »
Compte tenu que toutes les planètes du système solaire se réchauffent, je ne vois pas le rapport entre le pétrole et le réchauffement climatique de la Terre. Le co2 représente actuellement 4 molécules parmi 10 000 molécules d’air. Il y a deux siècles il y en avait 3 pour 10 000. Et on veut me faire croire que cette unique molécule supplémentaire capte tellement d’infrarouge que ça met en péril notre climat. lol. Le climat change continuellement selon les cycles de Milankovitch. Là on est dans le sérieux. Sinon pour les baleines, je suis d’accord…