Si je vous parle de l’impératoire (Peucedanum ostruthium), cela ne vous dira probablement rien.
Cette plante, qui aujourd’hui se fait discrète, a pourtant été une incontournable de la phytothérapie, et elle mériterait sans aucun doute un retour en grâce.
Je vous dis pourquoi tout de suite.
La petite protégée d’Hildegarde de Bingen
On trouve l’impératoire à l’état sauvage dans les prairies et au bord des ruisseaux de montagne.
Autrefois, elle était bien connue par les paysans des Alpes pour ses vertus santé.
Elle était fréquemment utilisée dans les onguents, les teintures et les décoctions, et était même considérée comme une panacée :
Bue en tisane, elle soignait la pneumonie, appliquée en cataplasme, elle soulageait les douleurs articulaires et désinfectait les plaies, en fumigations, sa racine assainissait les maisons, et simplement mâchonnée, cette même racine pouvait soulager les maux de dents.
Dans les villages montagnards, longtemps restés à l’écart des grandes voies de communication, les traditions locales et le savoir indispensable à la survie se sont transmis oralement, de génération en génération.
Dans son ouvrage Vivre et guérir en montagne, publié par le Centre d’Etudes francoprovençales[1], Henri Armand nous rappelle justement quelques utilisations traditionnelles de l’impératoire :
« Les contusions se soignent de préférence avec un pansement ou un cataplasme de racine d’impératoire. On prépare le cataplasme en cuisant de la racine hachée dans du lait et on l’applique encore tiède. »
« Quelques feuilles fraîches, dûment écrasées et appliquées sur un abcès, en calment rapidement la douleur ».
Ce n’est pas pour rien si l’impératoire était l’une des plantes préférées de la célèbre guérisseuse Hildegarde de Bingen (1098-1179), qui l’utilisait notamment pour soigner les problèmes digestifs et tous types de douleurs en général.
Les feuilles de l’impératoire possèdent des vertus thérapeutiques, mais ce sont surtout ses racines qui sont utilisées en phytothérapie.
Le suc jaunâtre qu’elles contiennent, que l’on appelle « l’huile de benjoin français », est riche en substances actives, comme les tanins (astringents, antimicrobiens, antiviraux), ou les coumarines (anti-inflammatoires, antioxydantes).
Pour un usage traditionnel
On attribue à l’impératoire des vertus apéritives, toniques, stimulantes des voies digestives, respiratoires, et anti-inflammatoires.
Pour en profiter, vous pouvez faire usage de cette plante sous différentes formes, les plus traditionnelles étant l’infusion et la décoction.
Vous pourrez ainsi soulager efficacement les bronchites (l’impératoire est expectorante), les troubles digestifs (elle permet de diminuer les gaz intestinaux), et calmer diverses douleurs (notamment dentaires ou articulaires).
Pour préparer une tisane, faites simplement bouillir une cuillère à café d’impératoire séchée (feuilles ou racines) dans 200 ml d’eau, puis laissez infuser le tout pendant 10 minutes. Buvez deux à trois tasses par jour.
Pour une décoction, faites bouillir une cuillère à soupe de racines séchées dans 500 ml d’eau pendant 20 minutes, puis laissez reposer 15 minutes et filtrez. Vous pouvez, là aussi, prendre deux à trois tasses par jour.
Pour les maux de dent, vous pouvez mâcher un morceau de racine comme vous le feriez avec un clou de girofle par exemple.
Pour ma part, j’aime aussi beaucoup la teinture mère (10 à 20 gouttes, 3 fois par jour, dans un verre d’eau) pour faire une cure d’une vingtaine de jours, lorsque mon système digestif montre des signes de fatigue. Les résultats sont excellents !
Pour les douleurs de dos, l’arthrose, ou encore les entorses, le cataplasme est également très efficace.
Il vous suffit de réaliser une pâte d’argile.
Je vous conseille d’opter pour une argile verte concassée, afin de pouvoir lui donner une bonne consistance, assez épaisse.
Pour faire votre cataplasme, munissez-vous d’un récipient en terre ou en verre (jamais de métal avec l’argile, car les échanges d’ions qui s’opèrent à son contact diminuent son efficacité) et versez-y la quantité voulue d’argile.
Couvrez l’argile avec l’eau issue d’une décoction d’impératoire et attendez que celle-ci se désagrège à son contact (environ deux heures).
Vous pourrez ensuite mélanger avec une spatule ou une cuillère en bois jusqu’à l’obtention d’une pâte épaisse.
Appliquez alors ce cataplasme sur votre peau et entourez-le d’un bandage pour le maintenir en place.
Vous pouvez le conserver de 15 minutes à 2 heures, mais veillez à ce que l’argile ne sèche pas.
Sinon, il vous faudra l’enlever avec de l’eau.
Au besoin, si vous trouvez que votre cataplasme sèche trop vite, humidifiez-le un peu avec un gant humide par exemple.
Pour ceux que ça intéresse, notez que l’impératoire peut aussi s’utiliser pour ses qualités gustatives.
A la montagne, l’impératoire aromatise des liqueurs et agrémente certains fromages,
Sa saveur, à la fois amère et poivrée, est à utiliser avec parcimonie.
Ce que l’impératoire nous avait caché
L’impératoire est une plante médicinale peu connue et finalement assez peu étudiée.
C’est bien dommage car les chercheurs qui ont voulu en savoir plus sur ses vertus ont fait des découvertes très intéressantes.
Par exemple, les résultats d’une étude[2] récente ont confirmé les utilisations médicinales traditionnelles du rhizome d’impératoire comme remède anti-inflammatoire et ont également souligné que ses feuilles peuvent être utiles à ces fins avec une efficacité égale ou supérieure.
En outre, il a été découvert que l’impératoire, traditionnellement préconisée en cas de bronchite et d’état grippal, possède bien de fortes propriétés antibactériennes[3].
Mais la découverte la plus surprenante est qu’elle serait un remède possible pour ralentir la progression de la maladie d’Alzheimer[4] !
Pour rappel, cette pathologie entraîne une lente dégénérescence des neurones.
Cette dégénérescence est due à la modification de deux molécules : la protéine tau et le peptide bêta amyloïde, qui, bien que naturellement présent dans le cerveau, s’accumule anormalement et forme des plaques (dites plaques amyloïdes) toxiques pour les cellules nerveuses.
Or, il semblerait que l’impératoire ait des propriétés anti-amyloïdogène, ce qui en fait un objet de recherche très prometteur pour l’avenir.
Cette plante n’a donc pas fini de révéler tous ses secrets.
Pour conclure, sachez que les risques liés à son utilisation sont rares et ne surviennent qu’en cas de surdosage (ce qui provoque nausées, céphalées, vertiges et douleurs abdominales).
Enfin, la sensibilité de la peau au soleil peut être accentuée en cas de consommation prolongée et par précaution, l’impératoire est déconseillée aux femmes enceintes et allaitantes.
Utilisez-vous l’impératoire pour vous soigner ?
Vos commentaires sont les bienvenus.
Bonjour, où peut-on trouver l’imperatoire ?
Sachant que les magasins bio ne vendent que des plantes très connues et communes, merci pour votre réponse.
Bonjour Loudenot ! Du coté des montagnes Suisses ou de la Haute Savoie dans les lieux humides, vous pouvez trouver de l’Impératoire.. Il en pousse naturellement sur le terrain près de ma maison. Vous pouvez passer en prendre un pied ou deux.. après elle se multiplie à profusion.. Bien cordialement, Christiane
Re-bonjour ! où habitez vous ?
Si vous n’en trouvez pas, je pourrai vous en envoyer.
Bon week end,
Chris
Bonjour, vous pouvez vous en procurer en herboristerie. Merci de suivre mes lettres. Bien à vous. Laurent.
j’aimerais la trouvé dans la nature,ou peut être trouvé des graines pour la semer pour bien la connaitre,merci c’est passionnant toute ses plantes
Bonjour Marie Noelle, oui je pense que vous pouvez en trouver dans la nature, dans les prairies sauvages, non traitées. j
Je sais qu’elle pousse avec vigueur dans certaines régions de Suisse et de Haute Savoie ou j’habite. ici le terrain est plutôt argileux et humide.
Pour l’instant, je n’ai pas pensé à garder des graines mais je pourrai le faire .. il y a toujours qq pieds à disposition si vous êtes intéressée.
Bien cordialement,Chrisiiane
Merci Laurent pour cet article sur l’Impératoire. Elle pousse volontiers en Haute Savoie où j’habite et elle est assez envahisante par ailleurs! Elle pousse jusque devant ma maison. Je peux en donner volontiers à qui viendra la chercher sinon je pourrai en récolter des graines et des racines et en donner volontiers ! Je m’en sert en tisane, fleurs et feuilles et j’ai même mangé des feuilles ajoutées à des légumes. elle a un petit gôut spécial. que je trouve pas désagréable.. Ici la nature est une mine d’or ..le lieu se situe à Féternes qui veut dire d’ailleurs « Le… Lire la suite »
Bonjour Christiane et merci pour votre partage ! Bien à vous et profitez bien de la belle nature qui vous entoure.