Chers amis,
Imaginez un jardin à l’abandon, cerclé d’une haie épineuse infranchissable.
Son seul accès est un vieux portail, fermé à double tour.
À l’abri des regards, cet espace sauvage cache le merveilleux et le vénéneux : les racines amères de vos peurs et les fruits sucrés de vos désirs, les fleurs parfumées de vos souvenirs refoulés et les feuilles irritantes de vos ressentiments.
Soumis aux forces contraires, ce jardin secret vous influence.
Il affecte vos relations, vos projets, vos réussites et vos échecs.
Tout cela sans que vous en ayez conscience, car vous ne vous souvenez plus de son existence.
Et si je vous disais que ce jardin, vous pouvez le redécouvrir et le cultiver ?
C’est du moins la proposition que fait le shadow work, une technique de développement personnel hyper tendance, notamment grâce aux réseaux sociaux.
Un héritage du psychanalyste et philosophe Carl Jung
Le shadow work (le travail sur l’ombre en français) est une pratique psy qui invite à explorer et accepter notre part d’ombre, autrement dit notre personnalité réprimée.
Si cette thérapie connaît un regain d’intérêt aujourd’hui, elle n’est pas nouvelle pour autant.
Datant du début du XXe siècle, elle trouve son origine dans les découvertes de Carl Jung, le théoricien du « moi de l’ombre »[1][2].
« Cette rencontre avec soi-même est, d’abord, la rencontre avec sa propre ombre. L’ombre est un passage étroit, une porte étroite, dont nul n’est épargné par l’étranglement douloureux qui descend au puits profond. Mais il faut apprendre à se connaître pour savoir qui on est », expliquait le psychanalyste et philosophe suisse.
Cette ombre relève de la partie cachée incompatible avec nos choix conscients.
Elle représente tout ce que nous refoulons, jugeons indésirable, inacceptable comme les croyances limitantes, certaines émotions (peur, honte, colère), les blessures et les traumatismes de notre enfance.
Les aspects lumineux de l’ombre
N’allez pas croire que tout y est obscur et négatif. Bien au contraire !
Car elle abrite aussi nos potentialités et nos énergies créatrices.
Imaginons que toute votre enfance, on vous a répété « les garçons ne pleurent pas », « la poésie c’est pour les nuls » ou encore « la curiosité est un vilain défaut ».
C’est ainsi qu’aujourd’hui, ce que vous pensez à tort comme étant de la sensiblerie, du vice ou sans intérêt se trouve désormais caché dans votre part sombre.
À force de lutter contre ces aspects de votre personnalité, vous vous épuisez, et vous vous privez de la liberté d’exister pleinement.
Sans compter que plus vous niez ou négligez cette part d’ombre, plus vous risquez de la voir réapparaître de manière indirecte sous les habits de l’anxiété, d’un acte manqué, d’autosabotage ou de difficultés relationnelles.
Selon Carl Jung « tout le monde porte une ombre et moins elle s’incarne dans la vie consciente de l’individu, plus elle est noire et dense ».
Bref, l’objectif du shadow work est de faire face et de comprendre ces facettes reléguées aux oubliettes, dans un but de réalisation de soi.
Je me dois d’être honnête avec vous.
Jusqu’à présent, je n’ai trouvé aucune étude scientifique venant attester les bienfaits de ce travail.
Seuls certains psychologues revendiquent son efficacité.
Je ne doute pas que des chercheurs se pencheront sur la question. Il me tarde de pouvoir les lire et de vous livrer leurs observations.
Faites une force de votre côté obscur
Reste que le shadow work est une exploration enrichissante !
Pour autant, attention, car chercher à défricher son jardin secret peut prendre des allures de montagnes russes.
Ce travail de l’ombre peut vous emporter dans des zones de turbulences faites d’émotions intenses (colère, peur, tristesse), de remises en question, de souvenirs douloureux, voire de résurgence d’anciens traumatismes.
Assurez-vous d’avoir les ressources suffisantes et n’hésitez pas à demander l’aide d’un psychologue ou d’un thérapeute.
Dans tous les cas, soyez bienveillant envers vous-même.
Je rappelle que cette thérapie vise l’acceptation et non l’autoflagellation, et encore moins l’autosatisfaction.
Et si vous teniez un shadow work journal ?
Que vous envisagiez de réaliser ce travail en solo ou accompagné, deux outils vous seront profitables : la méditation en pleine conscience et la tenue d’un shadow work journal.
Même si elles n’ont pas été étudiées dans le cadre spécifique du shadow work, ces deux techniques sont connues pour leurs nombreux bienfaits sur la santé physique et mentale[3][4][5].
Une amie proche utilise les deux, elle en a fait un vrai rituel bien-être.
Elle a bien voulu me raconter son expérience…
Pour être détendue et accueillir les émotions sans jugement, elle débute chacune de ses séances d’introspection avec une méditation.
Concrètement, elle s’installe dans un endroit calme. Les yeux fermés, elle réalise quelques inspirations et expirations profondes avant de revenir à une respiration normale.
Cela lui permet de se concentrer sur ses sensations, son corps…
Si des pensées surgissent, elle se contente de les observer, ne cherchant ni à les retenir ni à les chasser.
Après cette méditation de quelques minutes, elle prend son shadow work journal.
Elle note dans ce cahier des réflexions personnelles sous forme de questions qui la taraudent et de réponses non censurées.
Par exemple, quels défauts lui pèsent ? Pourquoi est-elle toujours irritée par une telle attitude ? Quelle émotion a-t-elle du mal à exprimer ?
En me racontant tout cela, elle a insisté sur le côté intime. Ce journal brut de décoffrage n’a pas à être lu par d’autres.
Je pratique de mon côté un autre type de journal intime, celui des gratitudes. Et je peux vous dire que, oui, l’écriture est thérapeutique !
Essayez, cela fait un bien fou.
Si coucher vos difficultés sur papier vous semble ardu, ne baissez pas les bras. Vous n’êtes pas démuni.
Il existe des livres qui permettent d’amorcer ce travail d’écriture, dont certains rédigés par des psychologues[6][7].
Peut-être aurez-vous envie de vous inspirer des réseaux sociaux…
Il est vrai que depuis quelque temps, ils s’agitent sur le #shadowwork. Instagram compte ainsi plus de 2 millions de publications sur le sujet.
Un raz de marée quantitatif… non qualitatif !
Vous imaginez bien que cette course au plus grand nombre de followers n’est pas le fruit de professionnels de la santé mentale.
Pire, certains tombent carrément amoureux de leur ombre et dévoilent en toute impudeur les résultats de leur questionnement !
On est bien loin de Carl Jung et de l’intégration de notre côté sombre !
Et vous pensez-vous que la part d’ombre doive être mise en lumière ? Le shadow work est-il une technique qui vous tente ? N’hésitez pas à partager vos commentaires.
A bientôt,
Laurent des éditions Nouvelle Page
Il est effectivement très important d’aborder notre part d’ombre. Grand merci pour cette présentation fort claire!. Une fois qu’on est convaincu du bien-fondé de cette démarche, avec quel état d’esprit l’aborder? Nous pouvons décider d’un moment précis – heure de la méditation, séance chez un thérapeute – ou alors -l’un peut accompagner l’autre – nous acceptons les messages du subconscient qui surviennent à des moments qui ne nous conviennent pas forcément. Ainsi en va-t-il d’une réaction de soi ou de quelqu’un d’autre dans la vie courante, d’un appel de notre corps, d’un événement inattendu humain ou atmosphérique, etc. Si on… Lire la suite »