La vérité sur l'interdiction des arômes « fumé » - Nouvelle Page Santé

La vérité sur l’interdiction des arômes « fumé »

Depuis juillet 2024, les arômes qui donnent un goût fumé aux chips, aux lardons, aux soupes, aux sauces, aux fromages etc. sont officiellement considérés dangereux pour la santé et interdits en Europe.

Voilà une excellente nouvelle, me direz-vous.

Oui, mais…

En lisant ma lettre du jour, vous penserez peut-être que je chipote… mais il y a tout de même des choses à redire, au-delà de cette avancée pour la santé des consommateurs que nous sommes.

Laissez-moi vous expliquer ce qui me chiffonne.

Une étude qui change la donne

Les arômes artificiels sont pléthore dans l’alimentation industrielle et, à mon humble avis, la plupart n’ont rien à y faire.

La prise de conscience est longue à venir même si, peu à peu, la toxicité de ces additifs commence à être exposée au grand jour.

Dernière « découverte » en date : les substances fabriquées par liquéfaction de fumée de bois seraient capables d’induire des « dommages dans le matériel génétique », ce qui pourrait « augmenter le risque de développer des pathologies comme le cancer ou des maladies héréditaires ».

Sacrée découverte !

Je ne suis pas un grand scientifique, mais je m’en doutais un peu…

Pas vous ?

Ces arômes, qui permettent d’ajouter aux aliments une saveur fumée sans recourir au processus de fumage, ont fait l’objet d’une étude qui a subitement réveillé la commission européenne.

L’étude en question a été réalisée par l’EFSA (Autorité Européenne de Sécurité des Aliments) en 2021[1].

Grâce à ce travail d’investigation, nous voilà débarrassés (ou presque, j’y reviendrai) de ces huit arômes :

  • Scansmoke PB 1110 (SF-001)
  • Zesti Smoke Code 10 (SF-002)
  • Smoke Concentrate 809045 (SF-003)
  • Scansmoke SEF 7525 (SF-004)
  • SmokEz C-10 (SF005)
  • SmokEz Enviro-23 (SF-006)
  • proFagus-Smoke R709 (SF-008)
  • Fumokomp Conc.(SF009)

Selon l’EFSA, six de ces huit arômes contiennent de façon certaine des substances dangereuses pour la santé, quant aux deux restants, ils sont aussi interdits par principe de précaution.

Alors, où est le problème me direz-vous ?

Eh bien, en fait…

Il y a un « mais »

Il y a 15 ans, l’EFSA publiait ses premières évaluations concernant le risque lié aux arômes de fumée avec une conclusion favorable à la possibilité de prolonger leur autorisation de mise sur le marché.

Pourtant, à l’époque, l’EFSA avait déjà constaté des problèmes de sécurité[2].

Des constatations visiblement insuffisantes pour prendre des mesures…

De plus, aucune analyse d’éventuels effets néfastes sur la fertilité ou le fœtus, ni aucune expérience visant à déterminer les effets d’une exposition à long terme n’avait été faite à l’époque.

On ne peut pas écarter un risque si on ne l’étudie pas !

D’autant que l’on sait que c’est lors d’une exposition prolongée que le risque est le plus important.

Interviewé pour Que choisir, Emmanuel Henry, spécialiste des questions d’expertise sanitaire, n’est pas étonné par cette étrange inertie[3].

« Les agences réglementaires ne sont pas conçues pour produire une science infaillible, mais pour réguler un marché tiraillé entre des intérêts parfois contradictoires, sanitaires d’un côté, industriels de l’autre. »

Des conclusions rassurantes vis à vis de certaines études n’ont rien d’exceptionnel étant donné les « liens de proximité que certains experts entretiennent avec l’industrie, susceptibles d’influencer leur mode de pensée et de les rendre moins sensibles au risque ».

Alors, l’agence européenne aurait-elle sciemment remis la question à plus tard alors que les arômes de fumée auraient déjà pu être interdits ?

Les risques ont-ils été sous-évalués ?

La question se pose, puisqu’une centaine de substances voient leur risque évalué par l’EFSA tous les ans.

Une interdiction, oui mais…

Cela fait décidément beaucoup de « oui mais », n’est-ce pas ?

De plus, il faut savoir que les arômes de fumée ne seront complètement retirés des produits alimentaires qu’en 2026, voire 2029 pour certains d’entre eux.

L’idée est de permettre aux fabricants de bénéficier d’une période de transition pour éliminer progressivement ces substances de leurs produits.

Celle-ci est donc fixée à cinq ans pour la viande, le poisson, le fromage et autres produits alimentaires pouvant être fumés par méthode traditionnelle (d’ici juillet 2029).

Pour les autres aliments, tels que les chips, les fruits secs, les soupes ou les sauces, la période de transition est de deux ans (d’ici juillet 2026).

Une quinzaine d’années avant d’admettre que ces arômes causent problème et de deux à cinq ans pour les faire disparaître de nos assiettes…

Pour ma part, cela me paraît un peu longuet, s’agissant d’un problème de santé publique.

Chacun se fera son avis, et je serais d’ailleurs ravi de connaître le vôtre en commentaires.

Les additifs au cœur d’une bataille de chaque instant

Les additifs alimentaires sont au cœur de nombreuses interrogations et polémiques, et ce depuis des lustres.

La bataille fait rage entre les industriels, les scientifiques, les institutions de sécurité alimentaire et les lanceurs d’alerte comme Foodwatch[4] ou Nouvelle Page.

La définition même des additifs donnés par l’ANSES[5] lance le débat d’entrée de jeu :

Ils sont définis comme étant « une substance qui n’est pas habituellement consommée comme un aliment ou utilisée comme un ingrédient dans l’alimentation. Ces composés sont ajoutés aux denrées dans un but technologique au stade de la fabrication, de la transformation, de la préparation, du traitement, du conditionnement, du transport ou de l’entreposage des denrées et se retrouvent donc dans la composition du produit fini. »

Les additifs sont clairement nés de l’industrialisation de notre alimentation.

En Europe, environ 330 additifs alimentaires sont désormais autorisés (52 pour le label biologique).

Là où cela devient effarant c’est que, pour être autorisé, un additif doit remplir différentes conditions, qui sont :

  1. n’avoir aucun effet délétère sur la santé des consommateurs.trices d’après les preuves scientifiques disponibles ;
  1. satisfaire un besoin technologique suffisant, non comblé par d’autres méthodes ;
  1. ne pas induire la consommatrice ou le consommateur en erreur ;
  1. présenter un intérêt en termes de consommation, qu’il s’agisse de conserver la qualité nutritive de l’aliment ou d’améliorer son goût, sa couleur ou son odeur par exemple.

Attardons-nous sur ce qui nous préoccupe le plus, c’est à dire le point n°1 qui concerne la santé.

Au regard de ce que j’ai écrit précédemment concernant les arômes de fumée, nous constatons qu’il est appliqué de façon pour le moins… souple.

Et ce n’est pas le seul additif pour lequel la suspicion est présente depuis des années sans que celui-ci ne soit exclu des produits alimentaires.

Les émulsifiants, par exemple, sont parmi les additifs les plus fréquemment utilisés par l’industrie agroalimentaire.

On sait que l’ingestion de certains d’entre eux provoque un risque accru de cancers, en particulier du sein et de la prostate[6], sans qu’ils ne soient pour autant proscrits.

Le cas du dioxyde de titane (une nano-particule) illustre aussi parfaitement le cas d’un additif initialement autorisé, donc jugé sûr pour la santé, mais qui a finalement été interdit, à l’échelle française d’abord, puis dans toute l’Europe.

Malgré de fortes présomptions de toxicité dès 2009, l’Agence française de sécurité sanitaire Afssa, (devenue l’ANSES) alertait déjà sur la toxicité des nanoparticules en général dans l’alimentation, il n’a été interdit qu’en 2022 !

Des études avaient également confirmé les doutes dès 2014[7] !

Entre 2009 et 2022 ? Rien…

Bien évidemment, d’autres additifs alimentaires demeurent autorisés malgré un faisceau de preuves indiquant une action délétère pour la santé.

Je pense aux nitrates et nitrites, à certains colorants (dits azoïques), aux édulcorants…

Les données publiques disponibles (études réglementaires ou publications dans des revues scientifiques) sont très limitées, ce qui permet aux industriels d’utiliser des produits potentiellement dangereux en toute légalité (ou en jonglant habilement avec les règles…).

Les effets cumulatifs, le fameux effet cocktail, sont également largement sous-estimés en ce qui concerne les additifs.

Je pourrais ajouter à ce tableau une évaluation des risques qui a longtemps manqué de transparence et des réévaluations trop peu suivies.

Trois mesures me semblent nécessaires et urgentes :

  1. Interdire immédiatement les additifs au moindre doute en vertu du principe de précaution et ne plus attendre des années de contre-expertises pour le faire.
  2. Réduire drastiquement la quantité d’additifs autorisés afin de minimiser l’effet cocktail et de limiter les risques.
  3. Veiller à ce que les additifs soient étiquetés de manière claire afin que les consommateurs puissent les identifier facilement.

Quel est votre avis sur la question ?

Pensez-vous que nous sommes suffisamment protégés par les organismes de sécurité alimentaire ?

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Sources :

Merci de ne poser aucune question d’ordre médical, auxquelles nous ne serions pas habilités à répondre.

En soumettant mon commentaire, je reconnais avoir connaissance du fait que les éditions Nouvelle Page pourront l’utiliser à des fins commerciales et l’accepte expressément.

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